J’ai 46 ans et j’étais assistante de 2003 à 2018. J’avais une passion pour m’occuper des enfants avec bienveillance, amour, rires et partage. Quinze années de ma vie que je n’oublierai jamais. Aujourd’hui, depuis sept ans, on m’interdit d’exercer mon métier à cause des recommandations de la Haute Autorité de Santé.
Le jour où tout a basculé
J’avais BB en garde depuis cinq semaines seulement. C’était un amour, un bébé très demandeur de câlins qui avait besoin d’être rassuré et qui était souvent malade avant le drame. Il avait eu une rhinopharyngite, puis une gastro-entérite, une otite, et n’était pas en forme. Cependant, j’avais accepté de l’accueillir car les parents travaillaient.
Ce jour-là, il ne se sentait pas bien depuis plusieurs jours : fièvre, perte d’appétit, diarrhée importante. Mardi soir, BB est parti avec son père après une journée difficile et beaucoup de pleurs. Je ressentais de l’inconfort et échangeais avec les parents par SMS. À 16 heures, mon petit bout vomissait son biberon. Son père venait le récupérer.
Deux bonnes heures passèrent. Début octobre en haute Savoie, il fait frais en fin de journée, donc je donnai une couverture à BB car il n’avait pas de manteau.
Mercredi matin, BB arrivait à 8 heures et n’était toujours pas en forme. Son père avait été prévenu que si cela continuait, je l’appellerais pour qu’il le récupère. La matinée passa, BB était fatigué, ses selles étaient liquides, il ne voulait ni boire d’eau ni son biberon de lait. Il était agité et j’étais inquiète, alors je prévenais les parents.
Il ne mangeait rien et se mettait continuellement son doudou sur le visage. Je décidai de le coucher à 12h30-13 heures. À 14 heures, des hurlements m’alertèrent : BB n’allait pas bien du tout. Il vomissait, était pâle et se blottissait dans mes bras pour s’apaiser. Je prévenais les parents pour qu’ils viennent le récupérer. En une fraction de seconde, BB s’évanouit, il était comme une poupée de chiffon dans mes bras. J’appelai directement les pompiers car je ne parvenais pas à joindre les parents.
Je ne sentais plus son souffle et le posai sur mon canapé pour commencer un massage cardiaque en suivant les instructions des secours au téléphone. Le SAMU et la gendarmerie arrivèrent dix minutes après mon appel, mais un léger souffle de bébé était là. J’étais tétanisée et horrifiée.
Quand le diagnostic est tombé
BB fut transporté à l’hôpital de Genève où des IRM et scanners furent effectués. Directement, l’hôpital dit aux parents de couper tout contact avec moi, la nounou. BB avait fait deux arrêts cardiaques entre chez moi et l’hôpital. Le lendemain, les parents décidèrent de le débrancher car il avait beaucoup trop de séquelles.
J’apprenais cela par message des parents. Vingt-quatre heures s’étaient écoulées depuis cette perte de connaissance de BB et on apprit qu’il n’était plus dans ce monde. À partir de là, tout s’enchaîna : des auditions en tant que témoin, je me sentais effondrée, ne mangeant plus ni dormant mais devais rester forte pour ma famille et mes enfants.
Un an après, j’étais placée en garde à vue pour meurtre sur mineur. Les parents étaient aussi en garde à vue chacun de leur côté. Après trente-sept heures de garde à vue, on me relâcha et m’autorisa à rentrer chez moi. À ce moment-là, je ne savais pas ce qui était pire : la garde à vue ou le message cardiaque sur cet être si petit. Je ne sais même pas comment j’étais rentrée chez moi.
En 2018, une nouvelle garde à vue fut effectuée. La Haute Autorité de Santé avait sorti ses nouvelles recommandations : la dernière personne responsable était coupable. Alors je fus inculpée et mise en examen sous contrôle judiciaire. La HAS m’avait déclarée coupable, donc le juge me mit en examen. J’étais accusée d’un crime que je n’avais pas commis ; on me demandait d’avouer une chose horrible que je n’avais pas faite : secouer ce petit être.
Comment peut-on encore aujourd’hui, au 21e siècle, accuser des personnes juste en se basant sur des recommandations de la Haute Autorité de Santé ?
Bébé est décédé en octobre 2016. Ma première garde à vue a eu lieu en septembre 2017, suivie d’une deuxième en novembre 2018. Depuis, ma vie est suspendue dans l’incertitude, mais je continue de clamer mon innocence.
Comment peut-on affirmer avec précision sur un simple scanner que cet hématome sous-dural a été causé à une heure et une minute précises ? Comment peut-on laisser des innocents être accusés d’une telle horreur ? Comment peut-on permettre aux innocents de vivre en mode survie pendant des années, comme moi qui suis accusée depuis sept ans avec cette épée au-dessus de ma tête ? Je ne suis pas seule dans ce combat. Parents et grands-parents sont également touchés. Il faut arrêter ces injustices, cesser d’envoyer des innocents en prison et faire en sorte qu’on ne condamne plus sans preuves solides. La France doit rattraper son retard par rapport à d’autres pays en matière de science et de justice. Bien sûr, il faut protéger les enfants de la maltraitance, mais il est également crucial d’arrêter ces injustices qui détruisent nos vies.
Vivre avec la suspicion
Mon couple n’a pas survécu à cette épreuve. J’ai dû protéger mes enfants, aujourd’hui âgés de 19 et 21 ans, qui attendent que cette terrible histoire se termine. Avec ce drame, j’ai tout perdu, y compris ma santé. Suite au choc émotionnel, je suis devenue diabétique de type 1, nécessitant une pompe à insuline pour le reste de ma vie. Mon corps a également développé un papillomavirus, obligeant une hystérectomie il y a un an. Aujourd’hui, je ne passe pas une nuit complète sans penser à mon petit bout qui aurait aujourd’hui 9 ans.
Financièrement, c’est une catastrophe. Je comprends vraiment ce qu’on dit quand on affirme que la liberté n’a pas de prix. J’ai perdu ma famille et ma maison, me retrouvant dans un appartement social où je dois gérer seule ma maladie, trouver un travail et le conserver tout en vivant chaque jour avec cette épée au-dessus de ma tête.
Aujourd’hui, j’éprouve toujours ce sentiment d’injustice et d’incompréhension. J’ai peur dès que je vois une voiture de gendarmerie ou reçois une lettre recommandée. La peur est omniprésente dans ma vie.
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